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Le Nouveau

Accueillir un nouveau qui vient d’un pays avec des noms de ville un peu bizarre ? « Rien de plus facile ! » pensent les enfants qui se connaissent depuis l’école maternelle. Un club d’accueil, des cookies et plein de bonnes intentions devraient suffire à intégrer Artem dans la classe. Pas si sûr. Un pont est à construire entre eux et elles. Mais lequel et comment ? Simon Grangeat s’empare d’un sujet sensible mais essentiel : celui de nos différences si difficiles parfois à accepter mais cruciales à intégrer.

extrait

Moi, je ne veux pas qu’il se sente malheureux ici. Ce n’est pas son école de toute sa vie, mais je me dis qu’il faudrait réussir à faire comme si… Comme si c’était sa ville… Comme si on était ses amis de toute sa vie… Comme s’il était comme nous, quoi… Ça vous dit, on fait un club ?
Un club de quoi ?
Un club d’accueil.
Moi, je pourrais préparer des gâteaux. J’adore ça.
Nous aussi, on adore tous quand tu prépares des gâteaux.
Moi, je pourrais ramener un sac de vêtements parce que je récupère toujours ceux de tous mes cousins, mais il y en a toujours tellement que je ne pourrai jamais tous les mettre alors autant que ça serve à quelqu’un.
Moi, je peux prendre le cartable de ma sœur qui est entrée au collège et qui n’a pas voulu garder celui de son CM2, alors qu’il est encore super bien.
Moi, je vais choisir dans ma bibliothèque les livres que je ne veux plus et puis je les amènerai pour le nouveau.
Moi, je ne sais pas trop ce que je peux faire, mais je vais y réfléchir ce soir et peut-être que j’aurai une idée. Sûrement, même.
Trop bien.
On va en prendre soin, du nouveau.
On va faire attention à lui.
C’est sûr !
On va l’accueillir.

l’écriture

Lorsque Laurent Bénichou, de La Maison Théâtre de Strasbourg, m’a invité à participer à l’aventure de ces Petites philo pour grands matins, ma dernière fille était en pleine tempête métaphysique. Elle venait de se rendre compte qu’elle était la seule de sa classe à « ne pas croire », pour reprendre ses mots d’alors (elle a compris depuis qu’elle croyait en réalité à énormément de valeurs et d’idéaux, même si elle n’avait pas besoin pour cela d’en référer à une quelconque divinité).
Mes premières recherches pour ce Nouveau ont donc exploré les questions du « même » et du « différent », de « l’identité » et de « l’étranger », de ce qui nous constitue en « sujet » – moi, toi – et en « groupes » – nous, vous…
Est-ce que j’apprécie l’autre parce qu’il me ressemble ou bien au contraire parce qu’il est très différent de moi ? Qu’est-ce qui fait de nous des individus étrangers les uns aux autres ? Qu’est-ce qui nous relie, au-delà de nos différences ? Et puis, surtout, comment accueillir l’Autre, comment faire humanité commune ?
Ces questions étaient déjà importantes au moment de l’écriture, elles sont devenues aujourd’hui encore plus essentielles.
J’ai essayé de les rendre vivantes sans les simplifier. De créer un terrain de jeu (théâtral, philosophique et politique) pour que des enfants puissent les explorer à leur tour.

Dans la presse

Quand un nouveau arrive dans la classe, les enfants, qui se connaissent depuis la maternelle, s’imaginent réussir à l’intégrer facilement. « Un club d’accueil, des cookies et plein de bonnes intentions devraient suffire… » Et pourtant, rien ne se passe comme prévu. Artem refuse leur soutien et la barrière de la langue n’arrange rien. L’accueil vire peu à peu à incompréhension, voire à l’oppression. Apprendre à accepter l’autre malgré ses différences n’est pas chose aisée, il faut parfois du temps pour créer ce lien crucial qui nous permet de vivre ensemble. Une pièce de théâtre sensible, subtile et juste de Simon Grangeat (auteur stéphanois !), écrite dans le cadre du projet Petite philo pour grands matins de la Maison Théâtre. Ce texte a pour vocation d’être joué par des enfants ou des adolescent·es et de rendre accessible à tous·tes la pratique du théâtre tout en cultivant l’art d’être libre.

Librairie Lune & l’Autre
Citrouille
n°101

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