En blesser un
in Troisième regard, saison 2
Théâtrales jeunesse, 2020
14 / 144 pages
PERSONNAGES :
chœur adolescent
Soutiens à l’écriture
commande du collectif Troisième Bureau,
dans le cadre du festival Regards croisés, 2020

Meï retourne encours après avoir été l’initiatrice d’un mouvement de contestation lycéen. Son ami Tristan a perdu un œil, victime d’un tir policier. C’est aujourd’hui qu’il sort de l’hôpital et retrouve ses camarades.
En blesser un saisit la jeune fille au moment où surgissent les doutes, la culpabilité, le sens à donner à une lutte politique où sociale quand la violence est la seule réponse opposée par l’État.
Autour d’elle, un chœur accompagne la jeune fille dans sa prise de conscience et dans l’élaboration des décisions futures.
extrait
Tristan entre, un pansement sur un œil.
Tristan. – Salut.
Meï. – Salut.
Tristan. – Tu dis rien ?
Meï. – Je t’ai laissé des messages. J’ai jamais autant parlé à une machine.
Tristan. – J’ai pensé à toi, moi aussi.
Meï. – Tu les as écoutés ?
Tristan. – J’ai plus de portable. Plus le droit de sortir non plus. Mes parents viennent me chercher à la sortie.
Meï. – Tu regrettes ?
Tristan. – Ils regrettent, eux, tu crois ?
Meï. – Parce qu’il faut pas, Tristan. Il faut rien regretter. On est jamais sortis des lignes. C’est eux qui deviennent fous.
Tristan. – Des fois, je me concentre, j’essaye de me mettre à leur place.
Meï. – C’est à eux de regretter !
Tristan. – À la place de celui qui m’a regardé.
Meï. – Aux flics.
Tristan. – Parce qu’il m’a bien regardé avant d’appuyer sur la gâchette.
Meï. – C’est à lui de regretter. Et puis au préfet. Aux ministres. Tous ces salauds qui se satisfont du monde qu’ils sont en train de fabriquer. Tu en veux, toi, tout d’un coup ?
Tristan. – T’as pas changé d’un pouce, toi.
Meï. – Me dis pas que ça t’a servi de leçon. Me dis pas que maintenant, t’es prêt pour l’abattage. Moi je suis toujours pas prête à entrer dans ce jeu-là. Si c’est la condition, je préfère pas grandir. De tout façon, il faudrait mieux jamais grandir si c’est pour finir en vieille conne.
Tristan. – Ça fait du bien de t’entendre, Meï !
Dans la presse

Dans ce nouveau recueil, nous découvrons huit pièces courtes accompagnées d’autant de « Lettres à moi, lycéen-ne (autobiographies décalées) » des autrices et auteurs qui ont participé à ce projet. Ces lettres, souvent émouvantes, éclairent les pièces d’une pointe de nostalgie sur le monde d’avant, celui d’une adolescence révolue. Huit voix énergiques pour dire la violence d’un amour, la blessure d’un ricanement, l’impossibilité de naître dans un monde en guerre… (…) Chaque texte est singulier : à nous de choisir parmi ces pièces chorales écrites pour être lues ou jouées, en classe ou sur scène.
Fanny Carel
La revue des livres pour enfants
décembre 2020


