Partie en Amazonie soutenir les indiens Guarani, Lucia Serfer est obligée de revenir précipitamment en France, au chevet de son frère, Samy, blessé lors d’un affrontement avec les forces de l’ordre. Alors qu’il est plongé dans un coma profond, elle le découvre militant écologiste, engagé comme elle…
L’écriture de Marcher tout droit est un combat est inspirée de faits survenus tant en Amazonie que sur les ZAD de Notre-Dame des Landes ou de Sivens. Il s’agit cependant d’une fiction qui déploie ses propres perspectives et sa problématique.
Une mécanique portée par la quête de la vérité et le questionnement intime du désir d’engagement.
Le texte a été accompagné à la table par le collectif À mots découverts.
Il est lauréat du label Jeunes Textes en liberté.
Il est finaliste du troisième Prix Lucernaire Laurent Terzieff – Pascale de Boysson.
Il a été lu à la Mousson d’hiver (2020) et au festival Les Hauts parleurs (2021).
L’écriture
L’écriture de Marcher tout droit est un combat nait de la rencontre avec Corinne Méric, de la compagnie Bande d’Art et d’urgence.
Elle me parle de son désir de travailler sur la fratrie, sur les chemins si divergeants que peuvent parfois prendre deux individus, issus d’une même enfance. Cette question si intime est d’abord très étrange pour moi, plus habitué alors aux questions systémiques, aux pièces-mécaniques démontant des processus macro-politiques (comme T.I.N.A. ou Un Coeur Moulinex)…
En laissant mûrir la proposition faite par Corinne, les frères et sœurs apparaissent sur mon chemin, qui tissent des ponts entre l’envie de Corinne et une place plus directement discursive qui est alors la mienne.
C’est l’été où le site Reporterre fait paraître une série d’enquêtes sur la mort de Remi Fraisse, tué par l’explosion d’une grenade assourdissante tirée par un gendarme, alors qu’il manifestait sur la ZAD de Sivens. Dans l’un des reportages, la parole est laissée à Chloé, la sœur de Rémi. Ses mots, son histoire commencent à faire résonner chez moi la question de la fratrie.
Plus tard, au gréé de lectures périphériques, je trouve chez un bouquiniste l’autobiographie d’Almir Narayamoga Suruí, un chef indien d’Amazonie. Au milieu du livre, un portfolio. L’image d’Agnès Soral au milieu des arbres luxuriants et de ces hommes et femmes vivant-là. Agnès Soral. La sœur de.
Je crois que c’est à ce moment que l’écriture a pu véritablement commencer. Quand le tissage m’est apparu évident entre ces deux exemples de frère et sœur, avec au milieu d’eux la question de l’engagement, de la manière de prendre part au monde.
Si la ZAD de Sivens d’un côté – avec la mort de Rémi Fraisse – et les indiens du Brésil – avec l’assassinat d’un de leur leader, Marcos Veron – sont évidemment au cœur de l’écriture, la pièce ne s’inscrit pour autant pas dans un courant documentaire. Les faits servent d’appui, de référents communs, mais Marcher tout droit est un combat est une fiction. Un questionnement sur notre manière d’habiter le monde.
La pièce prend la forme d’une tragédie antique.
En cinq mouvements et quatre chœurs, la figure de Lucia se déploie, dans sa lutte avec le pouvoir en place arque-bouté pour défendre coûte que coûte ses intérêts et ses capitaux.
Le point de rencontre entre le frère et la sœur s’opère à l’endroit de la violence exercée contre eux. Violence milicienne ou violence policière. Comment, dans cette violence-là, se rejoue la tension entre une histoire individuelle et une volonté collective – un engagement vers.
avril 2022
Le début de la pièce
Prologue
– C’est la nuit.
L’odeur de terre humide remonte
jusqu’à ta chambre.
– Tu te dis que c’est la nuit.
– La pluie vient juste de cesser.
– En vérité, tu es surexcitée.
Tu frissonnes.
Lucia Serfer. – Je connais cette odeur.
– Tu relèves la maigre couverture
sur tes épaules.
Lucia Serfer. – Je dois dormir.
– Évidemment que c’est la nuit puisque tes volets sont fermés.
Lucia Serfer. – Il faut que je dorme.
– Il ne faut pas que tu prennes froid, surtout.
– À chaque fois que le vent
s’engouffre entre les planches
disjointes des persiennes,
l’odeur de terre humide remonte
à tes narines.
Claquement.
Lucia Serfer. – Demain…
– Tu frissonnes.
Claquement.
Lucia Serfer. – Enfin.
– Tu ne t’attendais pas à la retrouver
ici,
cette odeur.
– Souvenirs en rafale.
– Dix mille kilomètres entre toi et ton passé.
Lucia Serfer. – Il faut que je dorme.
Sonnerie.
– Demain, tu y seras.
Lucia Serfer. – Ce n’est pas mon lit.
– Tu n’es pas dans ta chambre, non.
Sonnerie.
– Tu es presque arrivée.
Lucia Serfer. – Tout est si vivant.
Sonnerie.
– Ton téléphone.
Lucia Serfer. – Rêche.
– Décroche.
Pour découvrir le texte intégral, vous pouvez en faire la demande ici.
Entretien sur la pièce
En images
photographies des répétitions
compagnie Bande d’Art et d’urgence
Autour de la pièce
Marcher tout droit est un combat
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