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T.I.N.A. – Une brève histoire de la crise

Au départ, il y a la « crise ». Au départ, il y a la masse d’informations brutes, aux termes complètement obscurs. Au départ, il y a une furieuse envie de faire théâtre de cela, de porter cette crise sur la scène, de la démonter, d’en montrer les mécanismes et les enjeux politiques.

T.I.N.A. – Une brève histoire de la crise est né de la rencontre avec Sébastien Valignat (mise en scène, dramaturgie et jeu), Guillaume Motte, Vincent Fouquet (jeu) et Gaëlle Dauphin (scénographie). Nous avons commencé à chercher ensemble, du premier jour de laboratoire jusqu’à la création du texte.


T.I.N.A. – Une brève histoire de la crise a reçu l’Aide à la création d’Artcena (anciennement CNT) et le soutien à l’auteur de la SACD.
Le texte a été sélectionné et accompagné par le collectif À Mots Découverts, ainsi que par le Bureau des lecteurs de la Comédie Française.
Il a été sélectionné par les comités de lecture du théâtre de l’Éphémère (Le Mans), des TAPS (Strasbourg), du Panta Théâtre (Caen), de la Scène Nationale l’Apostrophe (Cergy-Pontoise) et du CDN d’Orléans.
Il a été lu à la Comédie Française, au théâtre du Rond-point, au CDN d’Angers, au CDN d’Orléans, aux TAPS de Strasbourg dans le cadre des Actuelles XVI, au théâtre Gérard Philippe de Fontenay-sous-bois.
Il a reçu la mention spéciale du comité de lecture Influenscènes.
Le texte est « coup de cœur 2013 » du comité de lecture du Panta Théâtre.
Il est traduit en grec en 2014.

La pièce a été crée en 2011 par la compagnie Cassandre, mise en scène de Sébastien Valignat.

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Ouverture

Vous savez ce que vous êtes venus voir ?
Une petite histoire de la crise.
Les subprimes, ça vous dit encore quelque chose ?
Les prêts hypothécaires…
Vous avez conscience de ce que vous êtes venus voir ?
Les recapitalisations.
La titrisation.
Les Asset Backed Securities, les Colateralized Debt Obligation et les Credit Default Swap…
T.I.N.A.
Quand on m’a parlé pour la première fois du spectacle, j’ai cru que c’était un biopic de Tina Turner !
T.I.N.A. There is no alternative
Cette phrase a été régulièrement prononcée par Margaret Thatcher, quand elle était premier ministre du Royaume-Uni, dans les années quatre-vingt. Elle voulait dire que malgré toutes les réticences et les protestations engendrées par sa politique, il n’y avait pas le choix.
Il n’y avait pas d’autre choix possible.
There is no alternative.
Vous vous y connaissez, vous, en économie ?
Parce que Margaret Thatcher, elle devait s’y connaître au moins un peu, pour faire ce qu’elle a fait.
Moi, je n’y connaissais rien, mais alors, rien du tout ! Je ne fais même pas mes comptes personnels !
Au début, ça parait compliqué, mais si on insiste, on arrive à saisir quelques éléments.
Tout petit déjà, les maths, j’étais complètement largué.
Des fois même, ça fait plaisir !
L’envie qu’on a eu, c’est d’essayer de comprendre un peu cette crise et, maintenant, de partager avec vous ce qu’on avait commencé à comprendre. Reprenons au départ. Revenons à l’invention du système. Ce qu’on sait, c’est qu’à l’origine de cette crise, il y a les États-Unis et des maisons, de petites maisons individuelles, des quartiers résidentiels. Le rêve américain, quoi : une maison entourée de son jardinet pour chaque famille. Un labrador, un pick-up, la tondeuse le dimanche. Au début, il y a la possibilité pour tous, d’accéder à ce rêve américain.

1. Les temps d’avant

Dans le bureau du banquier.
Paramo. – J’aimerais, j’ai trouvé une petite maison. Voilà, ce n’est pas grand chose, mais ça ira, ça m’ira bien même, j’en suis sûr. Seulement comment dire, je travaille, je travaille dur même, mais il me manque. Pas grand chose, en vérité, pas grand chose : j’ai toujours mis de côté, mais…
Le banquier. – Je vous écoute.
Paramo. – Alors voilà, j’aimerais, j’ai trouvé une petite maison.
Le banquier. – Vous avez besoin d’un prêt immobilier ? Aucun problème, nous allons constituer votre dossier.
Il se saisit d’un dossier. Au fur et à mesure de l’énoncé des pièces constitutives du dossier, Paramo présente les documents demandés et les pose sur le bureau du banquier.
Contrat de travail, fiche de paye du mois de décembre, fiche de paye du mois de novembre, fiche de paye du mois d’octobre. Votre patron n’a pas l’intention de vous licencier ?
Paramo. – Non, je. Je ne crois pas. Je ne crois pas !
Le banquier. – Certificat de non licenciement dans les dix prochaines années. Bail locatif actuel, taxe d’habitation, quittance de loyer du mois de décembre, novembre, octobre. Vous êtes marié ?
Paramo. – Oui, un peu. Merci.
Le banquier. – Contrat de travail de la conjointe, fiche de paye de la conjointe du mois de décembre, novembre, octobre. Vous vivez ensemble ?
Paramo. – Non, merci.
Le banquier. – Bail locatif de la conjointe, taxe d’habitation de la conjointe, quittance de loyer de la conjointe du mois de décembre, novembre, octobre, certificat de naissance, police d’assurance, livret de famille, complémentaire santé. Des parents ?
Paramo. – Plus.
Le banquier. – Certificat de décès. Des enfants ?
Paramo. – Pas encore.
Le banquier. – Attestation sur l’honneur. Même chose pour les garants. Deux pour vous, deux pour votre conjointe. Comment vous appelez-vous ?
Paramo. – Edouardo Diego Miguel Paramo.
Le banquier. – Excusez-moi. Titre de séjour, permis de travail, description du passeur et itinéraire emprunté.
Paramo. – Merci monsieur.
Le banquier. – À votre service monsieur.
Paramo fournit les dernières pièces au banquier qui feuillette le dossier, très sobre.
C’est votre salaire ? C’est peu. C’est très peu. Comment voulez-vous ? C’est trop peu ! Comment faites-vous ?
Paramo. – Je me débrouille.
Le banquier. – Monsieur Paramo, je n’irai pas par quatre chemins. Il y a chez nous deux catégories de clients : les primes, que nous estimons capables d’honorer leurs crédits, et les subprimes, que nous jugeons incapables du remboursement complet de leur dette. Très clairement, au vu des premiers éléments de votre dossier, vous n’êtes pas prime.
Pourquoi ne demanderiez-vous pas une petite augmentation ? C’est trop peu, là, c’est impensable !
Paramo. – Une augmentation ?
Le banquier. – Prenez le risque !


Pour découvrir le texte intégral, vous pouvez en faire la demande ici.

A propos de la pièce

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